Le pouvoir des kolams


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Une protection spirituelle

En Inde, les devantures des maisons sont ornées de dessins à la craie. Ces formes sont de simples traits qui s’entrelacent les-uns, les-autres. Lors de certaines journées spéciales, des bougies sont placées aux intersections, amenant une magnifique lumière dans l’obscurité. 

En Inde du Sud où j'ai l'habitude d'aller, il n’y a pas une devanture, pas une maison, pas une barrière qui n’arbore ces formes magnifiques. Tous les matins, les traces du kolam de la veille sont effacées et un nouveau kolam est retracé. Ces formes permettent de garder les énergies négatives en dehors de la maison. Cette pureté spirituelle est importante pour les indiens. 


Satsanga

Cette image de traits qui s’entrelacent avec des bougies me fait penser à une satsanga. Une satsanga est un groupe de personnes recherchant la vérité et la manière dans leur cœur, se réunissant malgré les différences pour s'éclairer les uns les autres. 

On est loin des groupements "new-age" dans lesquels le rassemblement est souvent le résultat d’une fuite dans le quotidien. Il s’agit ici de personnes ancrées qui s’engagent dans un apprentissage en groupe, et qui s’entraident. La satsanga forme une unité plus grande que l’addition des individus qui la composent. De la même manière, dans le kolam, la forme représente quelque chose de plus grand chaque trait.


Prêt à briller? 

Toutes les bougies n'ont pas besoin de briller en même temps. Nous sommes parfois dans une recherche compliquée de cette lumière au-delà de nos klesha (ego, peur,...) et de nos traumas. Il est impossible de chercher la lumière sans traverser nos ombres. C’est une recherche compliquée, et c’est là que le besoin d’appartenir à une satsanga est riche. D’autres vont briller pour nous, et plus tard, nous pourrons briller pour eux. 
Dans tous les cas, les énergies négatives ne passerons pas la porte. 


Le processus de la vie est dynamique, et à la manière de ces bougies, il nous rappelle que nous n'avons pas besoin d'être parfait. Par contre, nous avons besoin d'être bien accompagnée et bien guidées. 

Nous avons tous la possibilité d'allumer notre lumière. En fait, si l'on en croit les upanishad, la lumière brille toujours en nous. C'est la Vie, la Conscience, l'Amour, la Joie. 

Notre lumière est souvent recouverte par nos conditionnements, nos peurs, nos traumas, qui nous croyons être, la pression capitaliste actuelle, etc. 

C'est pourquoi, nous méritons tous de faire partie de ce genre de kolam. La seule condition est la suivante : sommes-nous prêt·e·s à aller chercher notre lumière au-delà de nos ombres?  Chaque lumière produit également une ombre.

C'est là que les choses se compliquent souvent. Nous pouvons nous sentir très mal en traversant ce tunnel. 


Les 4 étapes de la Haṭha-Yoga-Pradīpika

La Haṭha-Yoga-Pradīpika parle de cette traversée du désert. La quêtes spirituelle est constituée de quatre étapes. 


1. Ārambha-avastha 

C’est le début du chemin. Soudainement nous apercevons une lumière au bout du tunnel. Quelle joie ! C’est un moment d’excitation et d’enthousiasme. Notre énergie fonctionne mieux. Nous sommes comme amoureux de la vie, du Yoga. Nous sommes un peu dans la lune de miel de notre spiritualité. Tout devient possible pour nous. Du moins, c’est ce que nous pensons. Il ne faut pas prendre de décisions irréalistes à ce moment-là car nous avons tendance à nous surestimer. 


2. Ghaṭā-avastha 

S’il est vrai que l’énergie fonctionne différemment en nous, elle traverse doucement l’armure de notre égo pour se diriger vers notre propre nature. C’est un gros moment de crash personnel. Connectés à nos potentiels, nous comprenons que nous avons réalisé de nombreux choix par erreur, par association, par ego, etc. En même, temps, nos potentiels n’ont pas encore été suffisamment nourris et nous ne pouvons pas encore nous appuyer dessus. Dès lors, nous cherchons quelque chose de nouveau, mais nous n’avons pas encore les moyens d’y arriver. Nous savons que le passé ne nous convient plus ou plus tout à fait. C’est un burn-out, un crash, une dépression. De très nombreuses personnes reviennent en arrière car il y a trop de choses à changer. 


3. Paricaya-avastha

Doucement la reconstruction débute. Les choses se mettent en place petit à petit. Nous sommes plus en phase avec qui nous sommes. Notre vie commence à prendre une réelle direction. Notre bougie intérieure s’allume, mais les challenges restent nombreux. 


4. Niṣpatti-avastha

Nos potentiels et notre vie extérieure se rejoignent pleinement. Nous sommes en harmonie avec notre manière de vivre et nos potentiels intérieurs. Nous vivons notre dharma pleinement. Nous sommes épanouis. C’est à ce moment-là que nous libérons au mieux notre lumière. 


Cette transformation d’une chenille en papillon n’est pas simple. C’est la raison pour laquelle il est important de faire partie d’un kolam dans lequel certains personnes sont à différents niveaux et chacun peut s’inspirer de ce que fait l’autre. 

La lumière n'appartient pas qu’à nous même,  et nous ne pouvons pas la faire briller en permanence. C’est pourquoi appartenir à un kolam, à une sat-sanga est crucial. 


Namaste, 


Philip Rigo

www.mitra-yoga.be

dans Blog
La médecine traditionnelle indienne, l'Āyurveda, aujourd'hui